LA GARE

Sur cette carte datant de 1950 (© IGN), la voie ferrée est bien dessinée.

Histoire de la ligne Hirson-Amagne/Lucquy

 

Cette ligne, ouverte en 1885 et gérée par la Compagnie des Chemins de Fer de l'Est, a été créée pour répondre à deux objectifs:

  - Militaire : permettre des échanges directs entre le Nord et l’Est de la France

  - Économique : lien entre le bassin houiller du Nord et les usines métallurgiques de Haute-Marne. 

Localement, elle apporte du charbon à M. Surply, marchand de charbon à Chaumont, des pommes pour la cidrerie Malherbe à La Romagne.

Communes proches desservies par cette ligne

Liart

Montmeillant-Saint Jean

Draize-La Romagne

Wasigny-La Neuville

Novion-Porcien

Novy-Chevrières

Amagne-Lucquy

Cette ligne est fermée aux voyageurs en avril 1952.

Elle fermera au fret en 1953 pour la section Liart-Draize et en 1979 pour la section Draize-Amagne.

 

Construction de la voie ferrée

On trouve dans Le Petit Ardennais du 3 septembre 1884 une annonce concernant la vente de 40 bons chevaux de traits. Il est demandé de s’adresser à M. Frot-Gagnon, entrepreneur à Draize. Voilà qui interpelle ! La famille Frot est originaire du Loiret. Elle établit son entreprise de travaux publics à Sains-Richaumont (Aisne). Tout laisse à penser que ces 40 chevaux ont servi à la construction de la voie ferrée qui passe par Draize.

D’innombrables charrois de terre, pierre, bois ont été nécessaires, la voie est surélevée par endroit, un tunnel est creusé…

La gare

La gare est située à l'extérieur du village, en prenant la direction de Givron, une route sur la droite y conduit.

Une scierie est installée à proximité de la gare. Elle appartient aux mines du Nord et emploie, avant 1965, 30 ouvriers, puis 15 après modernisation jusqu’à la fermeture vers les années 1980.

Le bois servait à étayer les galeries des mines de charbon du bassin minier du Nord. Il était acheminé par chemin de fer.

Le cafetier de la gare a une carriole pour emmener les voyageurs.

Une arrivée en gare de Draize

Un petit moment de littérature ! Voici un extrait de La Peur de l'Amour écrit par Henri de Régnier en 1907

Une belle idylle en perspective …

M. de Roissy, un rentier parisien, se retire aux Aulnaies, en fait le château de Lalobbe, sur les conseils de son médecin. Sa fille Juliette l’accompagne dans sa retraite. Une voiture basse et un petit cheval leur permettent de se rendre aux invitations qu’on leur adresse du voisinage. Un ami parisien qui vient de perdre son père, Marcel Renaudier, vient leur rendre visite. Il arrive en gare de Draize où l’attendent Juliette et sa voiture.

 

Cette voiture avait été la première chose qu’avait vue Marcel Renaudier, en descendant du wagon en gare de Craize. Le cheval était attaché à la barrière. Le jeune homme regardait autour de lui quand il aperçut mademoiselle Roissy. Il l’avait reconnue tout de suite. Embarrassé, il ne savait comment l’aborder, quand elle lui avait tendu la main en lui disant : 

« Bonjour, Marcel. Votre train a du retard. Bon voyage, malgré la chaleur ? Donnez-moi votre bulletin de bagages … »

Et, vivement, elle avait remis la feuille au voiturier. :

« Carlier, il faut que les malles de monsieur soient aux Aulnaies avant dîner … Venez vite, Marcel, on cuit sur ce quai … »

Et il l’avait suivie docilement.

Au-dehors, elle avait détaché elle-même le cheval et rajusté un ardillon du harnais. Une fois Marcel assis auprès d’elle, elle lui avait demandé : 

« Êtes-vous bien ? »

et on était parti à belle allure. Il y avait une heure de chemin. Au bout d’un instant, elle lui avait dit encore :

« Je ne vous gêne pas ?

– Non, mademoiselle. »

Elle avait fouaillé la croupe luisante du cheval.

« Mademoiselle ? … est-ce-que vous êtes fou, Marcel ? Une amie des Tuileries comme moi ! Vous allez m’appeler Juliette, ou je vous verse ! »

Une montée assez raide avait mis la bête au pas. Il se souvenait de l’endroit. Au bord de la route, dans les champs, des pommiers noueux tordaient leurs branches. Alors elle lui avait parlé doucement, tendrement, tristement. Elle lui avait parlé de la mort de son père, du chagrin qu’il avait dû ressentir.